Psychédéliques.
Les cinq premières minutes.
Puis la lutte.
Mon inconscience contre ma conscience,
mes rêves bleus, verts, espérance,
mes inhibitions rouges, rouges comme le sang dans mon corps.
Mon inconscience me dit, joyeuse :
– Viens, viens, laisse-moi t’emmener, tendre, vers le monde des irréels.
Laisse-toi bercer, flotte sur les eaux de ta tendresse.
Viens prêt de moi, ta luminescence, tu brilles déjà.
Ma conscience broie du noir.
– Ouvre les yeux, tout n’est qu’interdit, mensonges et perfidie.
Fixe le carré de lumière. Reste dans ma réalité.
Je lutte, je combats mais j’ai hâte de perdre puis je me laisse aller.
Ma conscience rageuse me dit :
– tu ne vas pas t’en tirer comme ça !
Moi, ivre de plaisir, j’ai déjà commencé mon voyage.
Mon inconscience n’a jamais étée aussi heureuse, amoureuse, aimante.
Je la sens tout autour de moi, virevoltante, me faisant mille et mille promesses.
Sensuelle, elle m’emmène dans ses étoiles. Dans mon bonheur.
Je fais l’amour cent fois.
Elle a pris toutes les formes de mon imaginaire,
se donnant pleinement à chaque fois différente, glissant dans mon plaisir.
Puis, la main dans la main, assis sur un coin de verdure, quelques parts, la-haut,
je la sers dans mes bras, je lui tiens chaud. Je la garde, elle frisonne.
Quelle est belle mon inconscience.
Mais l’espace s’assombrit. Tout deviens noir.
Je la sens qui arrives au galop, comme une tornade.
Je suis pulvérisé. Mon irréalité disparait.
Je me retrouve là, les yeux ouverts.
Elle qui me regarde dans un coin, sévère.
– Je t’avais dit que tu reviendrais.
Quelle idée de voyager avec son âme, ne sens tu pas ton corps ?
Oh si, je le sens. J’ai chaud, je suis bouillant. La pensée d’un seul geste me fait suer.
– C’est ça la réalité me dit-elle, coléreuse.
Un corps est un corps, un cœur est un cœur.
Ne sens tu pas ton cœur ? Et le sang dans tes veines qui me charrie jusqu’à lui ?
Ce ne sont plus des veines, mais des rivières, des fleuves, des océans de sang.
Mon cœur se met à battre de plus en plus fort. Ma cage thoracique se gonfle,
elle va rompre, éclatée. J’ai du mal à déglutir, à respirer. Je ne peux plus
fermer mes yeux fixés sur le carré de lumière.
Ma réalité jubile, elle va gagner.
– C’est fini, tu as perdus, tu as perdus, li oh oh, li oh ah !
Je la hais.
Je fais un dernier effort. Si seulement mon inconscience m’aidait.
Je l’appelle pourtant. Un signe !
À l’ultime seconde de mon désespoir, alors que je m’apprête à redevenir moi-même,
je sens sa dernière tentative.
Tout son amour projeté vers moi pour me reprendre et me garder.
Je dois l’aider. Mes yeux se referment doucement et une fenêtre apparaît ;
Puis je la voie, tremblante, apeurée.
– Viens mon cœur, viens vite, dit-elle.
Alors je me précipite, je me rue au travers de la fenêtre. Je la prends dans mes bras et je m’envole.
Plus tard, allongés sur une plage brumeuse, au ciel gris, je la console.
Je lui caresse les cheveux, lèche son visage humide.
Ses larmes ruissellent sur mon corps. Elle me serre si fort.
– Je t’aime, je t’aime. Ne pars plus.
Le souffle régulier du vent m’apaise.
Oh non. Pour cette fois-ci, je ne pars pas, je reste. Je l’aime aussi.
J’ai gagné mon combat. Ma réalité s’est enfuie, dépitée.
Mon inconscience, ma belle, s’est endormie tout contre moi.
Je me blottis au creux de ses seins puis je m’endors à mon tour.
L’éternité nous appartient.